Le cheval a une durée de vie assez longue qui peut aller au delà de 30 ans. Il peut donc passer la moitié de sa vie à la retraite. D’où l’importance de décider du bon moment. Mais aussi de choisir un lieu bien adapté et sûr pour que votre compagnon ait une fin de vie confortable et digne. Avec le coût que cela implique. Il y a quelques règles d’or à respecter.
Depuis quelques mois, des centaines de chevaux retraités ont tristement fait la Une des médias à plusieurs reprises… Avec les révélations de l’existence de réseau de revente en boucherie de chevaux donnés ou revendus peu chers, entre autre par des particuliers, pour une retraite soit disant paisible. Les dérives existent même si elles sont, la plupart du temps, moins extrêmes. Il ne faut donc pas prendre les choses à la légère. Déterminer le moment, organiser cette vie nouvelle, trouver un lieu sûr en sont les points cardinaux.
La première décision sera évidemment de répondre à la question du « quand ? » et du « comment ? ». C’est un arbitrage délicat car dans ce domaine, il n’y a pas de règles. « En fait, il n’y a pas d’âge fixe. Cela dépend de l’histoire médicale de chaque cheval, de ses prédispositions génétiques- les ibériques semblent vieillir plus doucement- et de l’activité pratiquée. La décision doit donc être prise en tenant compte de tout cela. Une retraite doit être taillée sur mesure en fonction du passé du cheval. Les chevaux les plus délicats seront ceux dont la vie sportive aura été bien remplie. Il faut veiller à ne pas les « abandonner » au paddock, faute de quoi, ils risquent de mourir plus rapidement que les autres, » précise Patrick Pageat, vétérinaire comportementaliste, co-fondateur de l’IRSEA, Institut de recherche en sémiochimie et éthologie appliquées. Une décision donc à prendre de préférence avec un professionnel. Arrêter le travail, la compétition, ne veut pas dire pour autant l’arrêt total et brutal d’activité. « La cessation d’activité semble favoriser l’accélération du vieillissement et l’installation d’états dépressifs. C’est aussi une cause de dégradation rapide des muscles et cela explique l’apparence ‘’osseuse’’ de nombreux chevaux mis en retraite au pré après une carrière sportive. Ils ne sont pas affamés, ils n’ont simplement plus d’activité. Les balades sont certainement un moment sympathique, mais c’est aussi un exercice qui peut être physiquement éprouvant pour le cheval. Il faut donc le réserver à des chevaux qui ne souffrent ni de troubles cardiaques, ni de problèmes ostéo-articulaires. »
Une nouvelle vie dehors, en groupe, est la meilleure des retraites que l’on puisse offrir à son compagnon. Mais pour un cheval qui a toujours vécu en box -ou presque- le retour à l’état naturel, à la vie au pré avec des congénères ne s’improvise pas non plus. Cela doit se faire là encore par étapes et pas de façon brutale. Pour le vétérinaire, c’est une question importante à ne surtout pas négliger. Il faudra d’abord l’habituer à passer du temps en paddock ou au pré. « La vie en parc est évidemment essentielle à l’équilibre du cheval et aucun cheval ne devrait en être continuellement privé. Le paddock sera une source d’exercice intéressante pour un retraité, mais c’est aussi un risque d’accident pour celui qui n’y a jamais eu accès. On préfèrera donc des périodes brèves au début, en restant avec lui et faire des petits exercices en liberté. Quand l’arrivée en paddock sera devenue banale, sans surexcitation, on pourra augmenter la durée. »
Il faut également lui réapprendre à vivre en troupeau, avec son organisation sociale. Pour le comportementaliste, la présence des autres chevaux est une autre donnée complexe à gérer. « La capacité à interagir avec des congénères se développe pendant le développement du poulain, environ 3 ans. Les chevaux qui ont été soustraits précocement à leur contact n’ont pas forcément acquis les compétences permettant de communiquer. Et surtout, ils manquent de confiance dans le contact. Avec un cheval qui n’a pas eu une socialisation de bonne qualité, il faudra donc être prudent et se faire conseiller par un vétérinaire spécialisé. Pour les autres, la présence de congénères sera un gage de très bonne retraite et ces interactions pourront souvent se substituer très efficacement à l’activité sportive. Pour la mise en contact, privilégiez un temps d’observation de part et d’autre d’une clôture : cela autorise les contacts physiques et lorsque vous aurez observé des comportements d’allogrooming (des petits « bisous » sur l’encolure, les flancs), les chevaux pourront être mis ensemble. Il faut aussi rappeler qu’une des causes majeures de conflits est l’accès aux ressources essentielles que sont la nourriture, l’eau, les lieux de couchage secs et abrités. On veillera donc à placer des mangeoires à plusieurs accès (cornadis par exemple), des abreuvoirs et des aires de repos suffisamment vastes et accessibles. » L’alimentation est aussi un élément central à réorganiser. Rappelons qu’un cheval passe 70% de son temps à manger ou à chercher de la nourriture. Un cheval à la retraite vivant au pré mange de l’herbe. Il n’a donc normalement plus besoin d’aliments concentrés, ni de compléments. Cela n’empêche pas qu’il faut rester vigilant à ses besoins nutritionnels, à la quantité et à la qualité de l’herbe. La plupart du temps et dans la plupart des régions françaises, le foin est indispensable à certaines périodes, l’hiver comme l’été. Pour les chevaux qui perdent de l’état, le vétérinaire sera le seul bon conseil pour compléter son alimentation de base.
Le cheval retraité n’a pas nécessairement besoin non plus de soins vétérinaires particuliers, sauf si son état général et son comportement se modifient. « En dehors des troubles liés à l’usure et au vieillissement (les troubles neuroendocriniens et articulaires), et parfois des troubles cardio-vasculaires, le vieux cheval n’a aucun problème spécifique, en dehors de ceux qui peuvent résulter d’un entretien inadapté. En réalité, si on le compare au chien, le cheval est un animal qui vieillit bien et peut vivre longtemps (rappelons le cas du fameux Old Billy, ancien cheval d’omnibus londonien qui vécut 62 ans). Il existe des signes qui peuvent alerter le propriétaire ou la personne qui s’en occupe : amaigrissement brutal, un pouls jugulaire rétrograde (quand on regarde de profil la gouttière jugulaire, on voit une onde sanguine qui remonte en direction de la tête), difficultés respiratoires avec un cheval qui fait des efforts pour inspirer ou expirer, mais aussi hirsutisme, troubles du comportement (tendance à avoir peur de nombreuses choses autrefois bien supportée, stress, tics). » Ce n’est pas pour autant qu’il ne doit pas être suivi régulièrement par différents professionnels : le vétérinaire pour les vaccins annuels, le maréchal-ferrant pour le parage, mais aussi le dentiste, trop souvent négligé. « Ce n’est pas parce que le cheval cesse d’avoir un mors dans la bouche qu’il n’a plus besoin du dentiste. Les dents continuent à pousser et leur affrontement (notamment les incisives) devient de plus en plus anguleux, ce qui rend la prise alimentaire de plus en plus difficile. La première chose importante, c’est l’entretien annuel de la denture. »
Le choix du lieu de vie est une autre décision clef. Avoir un cheval, même retraité, coûte de l’argent à son propriétaire. C’est une donnée qu’il faudrait d’ailleurs prendre en compte dès l’achat de son compagnon. On ne vend pas à un bas prix, on ne donne pas son cheval à n’importe qui au prétexte que la personne qui vous le propose est sympathique. Même si elle vous promet que votre nouveau retraité finira ses jours tranquillement au pré avec ses congénères. Des histoires récentes sont là pour le rappeler. Des chevaux retraités donnés ou vendus peu cher étaient revendus à l’abattoir par des gérants de soit disant pensions familiales… Un trafic européen existerait et qui aurait fait 3000 victimes… Certes, ces cas extrêmes ne sont pas très fréquents, mais ils doivent alerter et rendre les propriétaires encore plus vigilants. Car il existe aujourd’hui de multitudes offres de pensions pour les chevaux retraités… et il existe le pire comme le meilleur. Il est incontournable de bien se renseigner sur le lieu et les propriétaires, aller voir sur place. Ces pensions pour retraités sont loin d’être gratuites car même si le retraité n’a pas besoin des mêmes infrastructures qu’un cheval en activité, les frais d’entretien restent les mêmes (nettoyage du box, entretien des prairies, nourriture, soins, manipulations…). Méfiez-vous donc des solutions "trop belles pour être vraies" qui sont souvent de l’arnaque pure et simple. L’UNPCS, l’Union Nationale des Propriétaires de Chevaux de Selle, a ainsi décidé de mettre sur pied un réseau de pensions à prix "honnêtes", appelées Pré-vert UNPCS ®, qui garantissent un bon environnement et un suivi adapté des chevaux retraités (cf 3 questions à…).
Si vous choisissez l’option « location de pré » pour minimiser les coûts et garder votre cheval près de chez vous, cela ne s’improvise pas non plus. Il est souvent nécessaire de l’aménager en conséquences : le clôturer correctement- idéalement avec une clôture électrique, mais jamais avec des barbelés !-, construire un abri sec et toujours propre, proposer un accès permanent à de l’eau claire… et prendre le temps incontournable pour les visites, les soins de base, l’apport en foin ou/et compléments éventuels. Une option à étudier en amont avec soin, car au final, elle n’est pas forcément plus économique.
Encadré
3 questions à François Carrara, Pdt de l’UNPCS, Union Nationale des Propriétaires de Chevaux de Selle
Vous avez souhaité rationnaliser les centres d’accueil pour chevaux retraités…
Oui. Parce qu’il y a pléthore de ces pensions, à tous les prix, et qu’il n’existe aucun contrôle. Les centres Pré-vert UNPCS ®, licenciés sous contrat par notre association, s'engagent auprès de vous au respect de la qualité de l'hébergement. Ce sont des professionnels et des particuliers qui aiment les chevaux. Nous avons aujourd’hui une vingtaine de centres d’accueil partout en France.
Comment recrutez-vous les centres et quels contrôles effectuez-vous ?
Ils font acte de candidature en précisant leur motivation. Ils remplissent un long questionnaire qui nous permet de connaître les installations, évaluer les compétences et la disponibilité des hôtes. Nous avons un cahier des charges : ½ hectare par cheval, abris en dur, pas de clôture barbelée, une alimentation en eau propre, des prés entretenus en zone non inondable, débarrassés de tout ce qui peut être dangereux… Ensuite, nous avons un long entretien téléphonique, puis nous allons sur place vérifier lorsque le contrat est signé. Ils restent libres de fixer leurs tarifs, en fonction des infrastructures proposées. Nous pouvons effectuer des contrôles surprises.
Quels conseils donneriez-vous aux propriétaires de futurs retraités ?
Ne jamais donner son cheval lorsqu’on le confie, il faut en rester propriétaire et pouvoir le récupérer si besoin. Pour moi, une pension à moins de 150€ est suspecte, car même un retraité nécessite du temps, de l’alimentation et du fourrage, des herbages entretenus… Il est nécessaire que le propriétaire aille visiter la pension, poser un maximum de questions à l’hôte, voir s’il a les compétences, regarder les autres chevaux… Ne pas hésiter à passer sans prévenir. Quand on habite dans les grandes métropoles, il est également préférable que votre compagnon soit un peu plus loin de chez vous, mais dans un bel environnement, dans un lieu bien adapté, des gens compétents… et des prix moindres.
Plus d’infos sur
L’avis du véto
Faut-il lui mettre une couverture en hiver ou le laisser faire son poil...?
« C’est un sujet de polémiques. Cela dépend, une fois encore, de leur passé. Rappelons l’importance de l’observation de la mue pour détecter les troubles neuroendocriniens du vieux cheval (cela semble concerner 40% des chevaux âgés de plus de 20 ans). La détection précoce permettra au vétérinaire de mettre en œuvre un traitement efficace. »
Encadré
Combien coûte un cheval retraité ?
Pension= 150€ mensuels au moins
Parage = 40€, 4 fois par an
Dentiste = 70- 100€ par an
Vétérinaire = 60-80€ pour les vaccins annuels
Vermifuges = 80€ minimum par an
Sans compter, les éventuels compléments alimentaires, les soins vétérinaires si le cheval est malade. Un cheval vieillissant est un cheval plus fragile.
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