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Le blog pro de Barbara Merle

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L'éthologie appliquée avec Elisabeth de Corbigny

Publié par Barbara Merle in Sports Equestres, Ethologie, Elisabeth de Corbigny, Leçon de van

Leçon de van

L’embarquement est très souvent source de difficultés. Qui n’a pas passé des minutes et de sminutes, voire des heures, à tenter de faire monter son cheval - un cheval- dans un van ou un camion ? Là encore, pour Elisabeth de Corbigny, il est essentiel que le cheval comprenne ce qu’on lui demande et qu’il ne considère plus cet habitacle comme un espace sombre, étroit, angoissant…

Virtuoso a 4 ans. Sa propriétaire, Chloé, 23 ans, le destine à la compétition, en concours complet. Il est évident que lorsque l’on passe la plupart de ses week-ends en concours, le cheval doit savoir monter dans un van sans problèmes, sans que l’embarquement ne devienne source de conflits… et de stress pour le cheval et le cavalier. Ce n’est pas la peine de rajouter du stress au stress de l’épreuve. « Quand je le monte dans un van, je le sens se contracter, il me regarde avec un œil blanc, et moi je commence à stresser. Pendant le transport, en revanche, il ne bouge pas, il est très sage. Je pense que c’est plutôt moi qui le stresse, parce que quand c’est quelqu’un d’autre, ça se passe bien. J’ai eu d’autres chevaux et je n’ai jamais rencontré cette difficulté. Nous l’avons fait débourrer à 3 ans, c’est un cheval sensible, qui peut avoir des réactions vives au sol, alors que monté, il se met facilement au travail, il est très volontaire. Je crois que j’ai un peu de mal avec lui à créer une bonne relation, je manque de confiance en lui et en moi. »

Pour Elisabeth de Corbigny, c’est bien sûr avant tout à la cavalière de prendre confiance en son cheval, mais l’apprentissage du cheval est également essentiel. Monter dans cet espace clos, sombre, étroit, bas de plafond, sonore… est tout sauf naturel. Le van doit devenir pour le cheval un espace, où malgré l’attache et les bas-flancs, il se sente bien, en sécurité, comme un lieu de repos. Mais avant tout, pour monter sans stress, il doit comprendre comment monter. « Pour cela, il faut apprendre au cheval à contrôler chacun de ses 4 pieds. Il faut aussi qu’il sache aligner sa tête, ses hanches et ses épaules, c’est à dire très concrètement, faire des petits pas de côté, pour se mettre en ligne face au véhicule. Cela paraît évident, mais croyez-moi, beaucoup de chevaux sont incapables de faire des choses aussi basiques. Comment voulez-vous ensuite qu’ils soient maniables sur des tours de CSO ou des reprises de dressage ! »

Cette séance se déroule en deux étapes spécifiques : le contrôle « pied à pied » du cheval, grâce à un travail sur des embuches, avant d’aborder la véritable leçon de van. Rien ne sert de débuter directement à la 2ème étape si le cheval ne sait pas « se servir de ses pieds ».

L’apprentissage « pied à pied » sur des embuches

Simple à mettre en place, ce dispositif permet au cheval d’apprendre, dans un espace aéré, à décomposer ses mouvements : il soulève chaque pied, l’un après l’autre, grâce aux barres au sol, puis dans un deuxième temps, il marche sur une bâche.

Le dispositif : sur une bâche, installer quatre barres afin de former un rectangle fermé de 2x 3m, tout en laissant dépasser largement les barres ; choisir un sol « naturel » : herbe, sable… photo 1

« Il faut d’abord tourner autour du dispositif, à main gauche et à main droite (éduquer les 2 yeux à voir la bâche), en se tenant soi même à gauche ou à droite, sans faire d’exercice particulier, pour que le cheval s’y habitue, le voit, le sente... Ensuite, commencer par passer une barre. Photo 2- 3 Il faut que le cheval passe un pied après l’autre tranquillement, sans essayer de trotter ou de sauter. Quand cela est acquis, on peut arrêter le cheval à tout moment, lorsqu’il a passé un pied, 2,3… Il doit savoir aussi reculer de la même façon. On peut ensuite tourner autour du rectangle en enjambant les barres. » Photo 4- 5

Quand tout cela se fait dans le calme et la décomposition des mouvements, le même exercice se travaille au trot, sans qu’il n’accélère, qu’il cherche à sauter, ou à les éviter.

Puis, au pas, Elisabeth se rapproche de plus en plus près de la bâche. Photo 6 « On le laisse la sentir, très important, car il ne faut jamais oublier que l’odorat est le sens le plus développé chez le cheval. Photo 7 Puis on lui fait mettre un pied dessus en passant le coin, comme par inadvertance, toujours en tournant autour… puis deux pieds, puis trois… Photo 8-9 Quand le cheval le fait bien, on passe la bâche en largeur, puis en longueur. Photo 10 On doit également pouvoir l’arrêter dessus, le faire reculer, le faire trotter… »

Autre exercice sur les embûches : lui apprendre à venir se « garer » le long des barres, en déplaçant latéralement et sur commande, ses hanches ou ses épaules. Cela permettra de le réaligner facilement au pied du pont ou bien de le faire pivoter une fois monté dans le camion. Photo 11

Savoir passer des passages étroits et sombres

Ce sont des exercices essentiels à pratiquer avant de faire monter le cheval dans un van ou un camion. Il faut le préparer aux lieux étroits, bas de plafond, peu éclairés pour éviter qu’il ne stresse. Photo 12 Il est facile de recréer ce genre de situation dans la nature. Exemple : ici, nous avons placé deux barrières contre deux arbres rapprochés. Elisabeth choisit ce passage étroit et sombre où la végétation empêche de voir le ciel. Pour complexifier la chose, elle rétrécit le couloir et ajoute une bâche sur l’une des barrières. Photo 13

… et des pentes naturelles

Autre exercice de maniabilité et de calme : monter et descendre des talus au pas et au trot, en bout de longe, sans « tracter » le cavalier à pied, et aux deux mains. Photos 14-15

La leçon de van

Il est important de faire cette séance dans un lieu sécurisé, en manège ou en carrière, et sur un bon sol. (Evitez le bitume !) Commencer en enlevant le bas-flanc.

« On crée une zone de travail imaginaire, un cercle d’une dizaine de mètres autour de l’entrée arrière du van. Photo 16 On apprend au cheval à s’approcher du van en révisant tous les exercices effectués sur les embûches : « pied à pied », reculer, se ranger le long d’une ligne imaginaire ou dans la largeur du van, en face de l’entrée… » Photo 17-18- 19

Le placer ensuite devant l’entrée du van, tranquillement, sans rien lui demander de plus, et le laisser sentir l’intérieur. Photo 20

« Puis on lui apprend à mettre un pied, l’enlever, le remettre, puis 2 pieds, puis 3, 4… Le principe est toujours de pouvoir tout décomposer à la demande. Si on ne lui demande rien, il ne doit pas bouger. A chaque fois, on rentre un peu, on recule, on rentre un peu plus, on recule. Une fois complètement rentré, on le laisse dedans quelques secondes, sans rien faire. » Surtout, ne pas le faire ressortir tout de suite, sinon, il va apprendre à anticiper vos demandes !

« Un conseil : s’il cherche à ressortir, laissez-le faire et dès qu’il est sorti, proposez un travail un peu intensif devant le van, à base de pivots, petits cercles, déplacements latéraux… de lui-même, il va adorer aller se reposer dans le van ! On ne doit pas entrer en conflit, surtout dans un espace où il risque de se blesser ! Il faut simplement l’occuper, être le « leader », parler et féliciter beaucoup quand il fait bien les choses. » Photo 21-22 Il y a trois leçons différentes : Option 1 : on accompagne le cheval, on monte et on descend en même temps que lui. Option 2 : on reste en dehors du van, et le cheval monte et descend tout seul, longe sur le dos. Photo 24 Option 3 : on monte en premier et on fait toutes les demandes en restant à l’intérieur du van en bout de longe. Photo 25

Il faut ensuite rajouter le bas-flanc et recommencer les mêmes exercices Photo 26, puis mettre et enlever les barres de croupes, puis ouvrir et fermer les portes du van, en gardant la progressivité à chaque nouvelle étape.

Attention : à la fin, si le cheval ressort de lui-même, sans l’avoir demandé, n’essayez surtout pas de l’en empêcher, mais une fois descendu, demandez-lui de remonter tout de suite. Faites la « pause friandise » une fois qu’il est dans le van. « Il doit choisir de rester dedans, non pas contraint et forcé, mais après avoir compris que dehors est une zone de travail, et que dedans est une zone de repos. »

Le petit « truc » en plus : lui mettre une mangeoire en hauteur, à l’intérieur avec des carottes ou des pommes, afin qu’il assimile que dehors, il travaille, et que dedans, c’est le confort/le réconfort. Photo 23

Monter dans un camion…

« C’est le même type d’exercices, mais le cheval doit savoir en plus comment se « garer » latéralement, car la plupart des camions ont une entrée latérale. On crée également la zone de travail devant le camion et on révise les exercices à pied avant de le faire monter. » Photo 27

Pousser la croupe… : pour lui apprendre -ou vérifier- que lorsqu’on le pousse avec la barre de croupe du van, il doit avancer, il existe un exercice simple : apprendre au cheval à « céder à la pression » d’un manche à balai posé en longueur sur ses fesses pour l’aider à comprendre le principe de la barre de croupe !

L’exercice +++: lorsque le cheval est capable de monter et redescendre calmement du van, et qu’il sait rester dedans sans être attaché (sécurité), on peut rajouter d’autres difficultés : gigoter autour de lui, faire du bruit dehors, dedans, tapoter sur les parois du van… le cheval doit rester zen en toutes circonstances. Bien sûr, y aller crescendo !

Conclusion

Une fois que chaque étape de cette leçon de van aura été comprise et apprise par votre cheval, à la maison (en plusieurs séances si nécessaire), cela ne vous prendra que 2 ou 3 minutes pour l’embarquer véritablement le jour du concours. Mais avant chaque transport, n’oubliez jamais de travailler quelques minutes à pied devant le van (zone de travail) pour « connecter » le cheval avec vous. Il se rappellera alors la leçon de van apprise antérieurement, et il montera calmement et sans hésitation. N’oubliez pas le « renforcement positif » au fond du camion (mangeoire) !

Pour en savoir plus :

www.decorbigny.com

« Equitation éthologique – Equilibre et Légèreté- Tome 3 » Editions Vigot